samedi 23 décembre 2023

PIERRES FINES (2e PARTIE)

Kawase Hasui
L'Etang au Sanctuaire de Benten à Shiba
1929


L'AGATE

Du grec akhatês, l'Agate doit son nom à une rivière de Sicile dans laquelle on la trouvait en abondance. En lithothérapie, l'agate nous ramène en phase avec la nature, elle est la pierre idéale pour apaiser les lieux de vie. On la trouve au Brésil, au Rio Grande do Sul et en Uruguay, ainsi qu'au Québec, sur le Mont Lyall en Gaspésie.





Joaquin Sorolla y Bastida
Maria at the Beatch - Biarritz
1906
Impressionnisme

L'AIGUE-MARINE

Aucune pierre fine ne porte mieux son nom que cette gemme couleur d'eau de mer...  Aigue Marine signifie "Eau de la Mer". Son orient offre une infinie variété de bleus, du plus léger et subtil, à celui des mers tropicales, et comme l'océan, elle offre une infinité de nuances... L'Aigue-Marine est une variété de Béryl, son bleu d'eau de mer est proche de celui de la Topaze Bleue. On la trouve au Mozambique, au Nigéria, en Zambie, à Madagascar et au Brésil.





Jean-Gabriel Domergue
Portrait de la Baronne Beatrice
à la Villa Ephrussi
1919

LA CITRINE

C'est une pierre fine rare, limpide, naturellement jaune d'or. L'époque romantique lui a réservé une place privilégiée en l'associant à l'or, et ainsi créer des bijoux de lumière chaude et douce. La Citrine est une variété de Quartz, elle doit sa couleur jaune à la présence d'oxydes de fer. Le terme "Citrine" vient du latin "citrus" pour qualifier sa couleur citron. On la trouve fréquemment dans les mêmes gisements que l'Améthyste. Elle se trouve à Madagascar, au Mozambique, en Zambie, en Tanzanie, en Bolivie, en Uruguay).


Eugène Janson
Stora Nygatan
1898


LA TANZANITE

La Tanzanite est une zoïsite transparente de la famille des silicates. Sa couleur varie du bleu au violet en raison de la présence de chrome et de vanadium (on en trouve très rarement des vertes, oranges, jaunes et roses). Son nom vient de la Tanzanie où elle fut découverte bien avant d'en extraire au Kenya.




Anders Zorn
Maria Ols
1918
LE GRENAT
Le Grenat est du silicate d'aluminium et de fer, elle va du rouge violacé au brun. Son nom, malum granatum, signifie "pomme à grain": grenade. Les gisements se trouvent un peu partout sur la planète : Autriche, Tchécoslovaquie, Sri Lanka, Brésil, Inde, Afghanistan.





Claude Monet
Grand Canal
1902


LE LARIMAR
Une pierre vénitienne ! C'est en Vénétie, à Fitta Soave près de Vérone, et en République Dominicaine que l'on exploite le Larimar, devenue pierre fine depuis 1979. Bleue comme les eaux du Canalazzo ! 





Ce billet fait suite à la première partie de la série "Pierres Fines" paru en octobre 2016, j'insère ici le lien : Clic car cela remonte à loin... 
Afin d'illustrer chaque pierre, j'ai choisi une oeuvre dont la couleur dominante se rapproche le plus de l'orient de la gemme.

samedi 9 décembre 2023

LES HEURES ET LES SAISONS D'HENRI LE SIDANER

 

Henri Le Sidaner
Automne
1923

Henri Le Sidaner... Ce fut grâce à Frits Thaulow, dont il était l'ami, que j'ai découvert cet artiste, il y a longtemps maintenant, et à qui je n'avais pas encore consacré de billet sur ce blog, malgré qu'il fasse partie de mes artistes favoris.


Henri Le Sidaner
Place de la Concorde
1909



J'aime par-dessus tout ses transparences, ses atmosphères délicates et lumineuses, si bien retranscrites, si bien approchées, imbibées, offertes, à l'oeil du spectateur. On entre dans un tableau d'Henri le Sidaner, comme on entre dans une brume à l'automne, ou dans une aube de printemps. C'est doux, c'est magnifique, ça me parle.



Henri Le Sidaner
Un Soleil Matinal, Venise


Henri-Eugène Le Sidaner, fils d'un capitaine au long cours, était né à Port-Louis, sur l'Île Maurice, le 7 août 1862. Il passa son enfance à Dunkerque, et partit étudier la peinture à Paris où il devint élève aux Beaux-Arts en 1882. Le Sidaner était fasciné par la peinture d'Edouard Manet et par l'impressionnisme, qu'il découvrit lors de son arrivée dans la capitale. En 1884, il entra dans l'atelier de l'artiste pompier Alexandre Cabanel, qui sera toujours pour lui un indéfectible soutien.



Henri Le Sidaner
Bec de Gaz, Nuit Bleue, Venise 
1906


C'est à Etaples que l'artiste reçut une sorte de révélation, lors de son arrivée à la Compagnie des Peintres Français et Etrangers, dont il dira : "J'ai le souvenir le plus émouvant du jour et de l'heure où je subis l'impression inoubliable de mon arrivée à Étaples, de ce bain dans l'air et la lumière, de la sensation de vie saine et vierge qui m'attendait." Le Sidaner resta travailler à la Compagnie des Peintres Français et Etrangers jusqu'en 1893.




Henri Le Sidaner
Grand Canal au Clair de Lune
1905



En 1887, il exposa au Salon des Artistes Français, son style et ses sujets n'étaient pas encore ceux pour lesquels il reste célèbre, il s'agissait surtout de jeunes bergères ou de tableaux aux sujets plus religieux.

Henri Le Sidaner
Pont des Soupirs vu depuis le Ponte Della Paglia
1906



En 1892, il visita l'Italie et la Hollande, où il se lia d'amitié avec l'artiste norvégien Frits Thaulow, et son style s'affirmaIl quitta Etaples pour Paris et pour ainsi se rapprocher des artistes symbolistes, et rejoindre la Société Nationale des Beaux-Arts, puis celle des Peintres et Sculpteurs.


Henri Le Sidaner
Grand Canal, Venise
1914


L'artiste mourut à Versailles en 1939, où il s'était retiré après avoir vécu à Gerberoy, une ville du département de l'Oise, qui ne l'a pas oublié, car elle fait revivre les belles heures du peintre en ouvrant les jardins de sa maison à la visite, jardins qu'il a peint et tant aimés.



Henri Le Sidaner
Le Soir sur la Maison
1925


Henri Le Sidaner
Pont des Soupirs
1912




Henri Le Sidaner
Neige dans le Jardin à Gerberoy
1924


Henri Le Sidaner
Le Dimanche
1898


Henri Le Sidaner
Canal à Bruges, Hiver
1899


Henri Le Sidaner
Le Jardin Blanc au Crépuscule
1924

jeudi 21 avril 2022

WATERHOUSE, LE PRERAPHAELITE MODERNE


John William Waterhouse
L'Esprit de la Rose
1908



C'est dans l'atelier romain de ses parents artistes, William et Isabela Waterhouse, que John William Waterhouse passait ses journées d'enfant, et grâce à cela, vit naître sa passion pour la peinture, la sculpture et l'Antiquité. 
De Rome, où l'artiste naquit en 1849, ses parents rentrèrent à Londres lorsque le jeune John William eut 5 ans. Baptisé le 6 avril 1849, certains historiens de l'art pensent que l'artiste serait né entre le 1er et le 23 janvier.


John William Waterhouse
A Tale from the Décameron
1916


















Son père entreprit de lui apprendre la peinture, le jeune élève l'assistait dans son studio et prenait des cours à la South Kensington School, près de son domicile et du Victoria and Albert Muséum  où il allait copier des oeuvres ainsi qu'à la National Gallery.

John William Waterhouse
Flora et les Zéphyrs
1898


John William Waterhouse
Echo et Narcisse
1903


Admis à l'Académie Royale des Arts en 1870, et dans les années qui suivirent, l'artiste commença à se faire connaître grâce à des oeuvres plutôt classiques. Ces oeuvres, d'une grande originalité, pourtant souvent mélancoliques, dévoilaient sa fascination pour la mort et le royaume des ombres, et à ses sujets  empruntés à la mythologie gréco-romaine, dans la veine de Frederic Leighton ou de Lawrence Alma-Tadema.




En 1874, Waterhouse présenta l'Allégorie "Sleep ans His Half-Brother Death", (Le Sommeil et son Demi-Frère la Mort, représentés par Hypnos et Thanatos)  à l'exposition d'été de la Royal Academy où il eut beaucoup de succès. 

 
John William Waterhouse
La Fileuse
1874

L'artiste devint membre associé de l'Académie Royale en 1885 et un membre à part entière en 1895. Et avant d'en démissionner en 1889, il fut aussi élu au Royal Institute of Painters in Watercolours en 1883, année de son mariage avec Esther Kenworthy, fille d'un professeur d'arts.

Consulting the Oracle
John William Waterhouse
1884

"Consulting the Oracle" apporta à Waterhouse des retours favorables, car le tableau fut acquis par sir Henry Tate, ainsi que The Lady of Shalot, tableau inspiré par le poème de Tennyson (Elaine d'Astolat, jeune femme amoureuse de Lancelot, amour qui n'est pas payé en retour), exposée à l'Académie en 1888. Il en fera deux autres versions en 1896 et en 1916.


La Dame de Shalot
John William Waterhouse
1888


C'est autour de 1890, que ses tableaux rendirent hommage à la femme, à l'eau et à la nature, dans une série de toiles parfois énigmatiques, aux riches couleurs et aux atmosphères particulières, avec un rendu final qui captive toujours le regard. Waterhouse empruntait ses sujets dans les oeuvres d'Ovide, de Dante, de Keats, Boccace, Shakespeare et Shelley.


John William Waterhouse
Hylas et les Nymphes
1896


Hylas et les Nymphes 1896 (détail)


Circe Individiosa
John William Waterhouse
1892

On dit l'artiste proche des Symbolistes, sa Circé Individiosa en est un parfait exemple, mais Waterhouse était totalement un peintre de son temps, qualifié aujourd'hui de "préraphaélite moderne" car sensiblement capté par le vent novateur de la facture des impressionnistes français, et par la scène artistique parisienne de la seconde moitié du XIXe siècle. Fidèle au monde de la mythologie et des légendes, il fut aussi inspiré par la musique et la poésie. 

John William Waterhouse
Circé 
1911



Parmi ses oeuvres les plus magistrales, on retrouve Ophélie, Circé, Hylas et les Nymphes, la Belle Dame Sans Merci, Echo et Narcisse... De magnifiques oeuvres que l'artiste exposait à la Society of British Artists, à la Dudley Gallery, à la Grovenor Gallery ou à la New Gallery par la suite.


John William Waterhouse
Les Danaïdes
1906

Waterhouse reçut une médaille d'argent à l'Exposition Universelle de Paris en 1889.
L'artiste disparut le 17 février 1917, on peut voir sa sépulture au cimetière Kensal Green à Londres.

John William Waterhouse
Les Cueilleuses d'Oranges
1890


John William Waterhouse
Destiny
1900


John William Waterhouse
The Charmer
1911

John William Waterhouse
Juliette
1898

John William Waterhouse
Ophélie
1894


John William Waterhouse
La Boule de Cristal
1902

mercredi 16 février 2022

MARIE-GUILLEMINE BENOIST


Marie Guillemine Benoist
Portrait d'une Femme Noire
Ou Portrait de Madeleine
1800
Musée du Louvre - Paris
Néoclassicisme


Marie-Guillemine Benoist... Son nom ne vous dit peut-être rien à brûle-pourpoint, mais l'une de ses oeuvres a rendu cette artiste célèbre. Cette toile peinte en 1800, conservée aujourd'hui au Musée du Louvre, (et dont le titre a été changé), est le premier tableau dont le sujet est une femme noire. Or, en cette période où les horreurs de l'esclavage sévissaient, l'artiste a osé s'y opposer et affirmer son intérêt pour la beauté d'une femme noire, chose totalement exceptionnelle, voire exclue, à cette époque. Aujourd'hui, sur son cartel au Musée du Louvre, le tableau se nomme "Portrait d'une Femme Noire" mais son titre, à la base, celui que Marie-Guillemine Benoist choisit lorsqu'elle présenta sa toile au Salon était "Portrait d'une Négresse", il fut peint 6 ans après l'abolition de l'esclavage.


Gravure 1794
Première Abolition de l'Esclavage par la Convention
16 Pluviôse An II (4 Février 1794)
lien

Citoyenne de son temps, Marie-Guillemine Benoist fut peut-être influencée par les gravures publiées dans les années 1790 (l'esclavage fut aboli une première fois en 1794) où les courants abolitionnistes présentaient des femmes et hommes noirs anonymes coiffés du fichu blanc devenu symbole de liberté, associé à la mention "moi égal à toi, moi libre". Si cette devise ne figure pas sur le tableau, le regard que nous adresse cette jeune femme semble en être la traduction. En 1818, ce tableau fut acheté par le roi Louis XVIII.


Ce portrait permit d'asseoir la réputation de l'artiste et lui fit obtenir une bourse afin d'ouvrir une école d'art réservée aux femmes (il ne faut pas oublier que certains cours de l'Académie royale de peinture et de sculpture, dissolue en 1793 et ancêtre de l'Académie des Beaux-Arts, n'était malheureusement destinée qu'aux hommes - parce qu'une femme ne devait pas voir un modèle masculin nu ! (Par contre l'inverse paraissait tout à fait normal) et que les femmes ne pouvaient pas y enseigner non plus. Cet enseignement officiel leur sera refusé pendant tout le XIXe siècle suivant ! Ce fut l'Académie St-Luc qui forma Elisabeth Vigée-Lebrun, célèbre portraitiste de Marie-Antoinette, et formatrice de Marie-Guillemine Benoist).


Portrait d'une Dame
Marie Guillemine Benoist
vers 1799
Musée de San Diego


Fille d'un haut fonctionnaire, Marie-Guillemine de Laville-Leroux, épouse Benoist,  naquit le 18 décembre 1768 à Paris. De 1781 à 1782, elle se forma dans l'atelier de la portraitiste Elisabeth Vigée-Lebrun et suivit les cours de Jacques Louis David, à l'instar de sa soeur : Marie Elisabeth Laville-Leroux, peintre des campagnes napoléoniennes.

Marie Guillemine Benoist fit partie de la génération des jeunes femmes qui accédèrent à la carrière de peintre à la veille de la Révolution. Dès 1784, elle exposa des scènes de genre et des portraits à l'Exposition de la Jeunesse, mais elle ne voulut pas se cantonner aux "sujets mineurs" accordés aux femmes artistes. 


Marie Guillemine Benoist
Autoportrait 1790



Dans son autoportrait, (ci-dessus) on peut voir l'artiste entrain de copier un détail du "Bélisaire demandant l'Aumône" de Jacques Louis David, un tableau d'histoire, le genre le plus prestigieux pour les peintres. Elle réalisa plusieurs portraits de Napoléon et de sa famille dont son portrait pour la ville de Gand quand il était encore Premier Consul. 


Portrait d'Elisa Bonaparte
Grande Duchesse de Toscane
Marie-Guillemine Benoist
Vers 1805
Musée de la Villa Guinigi de Lucques
Néoclassicisme


Une autre oeuvre révèle les convictions féministes de l'artiste : "L’Innocence entre la Vertu et le Vice", (voir ci-dessous) peint en 1790 : le Vice y est représenté sous les traits d’un homme alors qu’il l’est traditionnellement sous ceux d’une femme par les artistes masculins : 


L'Innocence entre le Vice et la Vertu
Marie-Guillemine Benoist
1790
Néoclassicisme


Petit à petit Marie Guillemine Benoist se libéra des influences de la peinture de David en abandonnant les sujets classiques pour la peinture de genre. Le 12 mars 13, l'artiste épousa Pierre-Vincent Benoist d'Angers dont elle eu trois enfants. 


Marie Guillemine Benoist
"Deux Enfants avec un Nid d'Oiseau"
Reproduction en noir et blanc
représentant les deux fils de l'artiste,
Prosper et Denys Benoist d'Azy
1806
localisation inconnue


Au salon de 1806,  l'artiste présenta deux tableaux : celui de "Deux Jeunes Enfants avec un Nid d'Oiseau", et "Le Sommeil de l'Enfance" . 

Le Sommeil de l'Enfance
Marie Guillemine Benoist



À la Restauration, Marie-Guillemine Benoist fut priée par son mari de renoncer à exposer afin de ne pas nuire à sa carrière politique : Pierre-Vincent Benoist fut nommé conseiller d’État en 1814... L'artiste céda et cessa d’exposer ses tableaux en public alors qu’elle était au sommet de sa carrière... Hélas.
Elle écrivit alors ceci à son mari : "La pensée que je serais un obstacle à votre avancement dans votre carrière serait pour moi un coup bien acéré. .../... Mais tant d’études, de soins, une vie de dur travail, et après ce long temps d’épreuves, les succès, et les voir presque un objet d’humiliation, je n’ai pu supporter cette idée. Enfin, n’en parlons plus, je suis raisonnable… "

L'artiste repose au cimetière du Mont-Valérien à Suresnes.

Marie Guillemine Benoist
Autoportrait 1813